samedi 21 février 2009


pour lui,









Il fut un temps où tu recevais des lettres. Pas des e-mails, des sms, des lettres, simplement.
A 15 ans, les premières d'un aimé qui habitait à 1000 kilomètres de chez toi et qui disaient l'amour, le désir, l'espoir d'être ensemble pour toujours
Tu attendais le facteur, tu guettais la boîte aux lettres. Tu étais toujours impatiente. Parfois c'est ta mère ou ton père qui les déposaient sur ton bureau, tu les découvrais le soir en rentrant de l'école. Tu allais au lycée, tu détestais ça. Ces lettres étaient la promesse d'autre chose. Un autre monde. Une autre vie. L'adolescence.
Tu les as gardées, elles t'accompagnent depuis presque 30 ans. Elles sont dans une boîte - toujours la même. Personne n'a le droit d'y toucher.  Tu en ouvres parfois quelques unes mais une vague tristesse t'envahit alors. Ce papier, cette enveloppe, cette odeur inchangée te rattachent à un passé qui s'éloignent et que tu ne peux rattraper, comme les photos que tu conserves par centaines et qui te blessent.
 
Des années plus tard, tu as reçu d'autres lettres, de très belles aussi. Beaucoup de celui qui allait devenir le père de ta fille. Mais lui aimait surtout les cartes postales et les petits mots qu'il inscrivait dessus et dont il avait le secret. Tu avais 25 ans. Tu t'étais réconcilliée avec l'enseignement et fréquentais alors les bancs de l'université. Il était écrivain et philosophe. Tu lui répondais, tu essayais d'être à la hauteur de cet échange. Une enfant est née de cette union. Tu l'as appelée la joie (Julie Simha). Celles-ci, tu les as gardées pour elle, Julie, mais tu ne les relis plus. Tes 15 ans étaient loin.


Aujourd'hui, ta boîte aux lettres n'est plus une promesse. Elle ne dépose que des factures, des publicités, parfois quelques cartes postales égarées. 
Cela ne te rend pas triste mais nostalgique. Le regret d'un monde peut-être moins efficace, moins rapide, moins performant… mais plus poétique, plus humain. 

Tu as naturellement adopté le courrier électronique. Il calme ton impatience naturelle. Les doigts qui courent sur le clavier. Un clic. Deux clics. Une réponse quelques minutes plus tard de l'autre bout du monde. Mais plus aucune lettre de Provence ou d'ailleurs. Que des messages virtuels qui n'engagent personne. 

Au début, tu écrivais de vraies lettres, tu gardais même tous les messages électroniques que tu recevais. Tu faisais des dossiers, tu classais, triais, imprimais, relisais ce qu'on t'avait envoyé
On s'est vite moqué de toi. 
Alors tu as delete à ton tour, clic clic clic. 
– Je t'aime je t'aime je t'aime. 
– Moi non pl---------------------